
Une toile à la manière du célèbre peintre vient d’être dévoilée. Imaginée de toute pièce par un algorithme elle a ensuite pris forme grâce à l’impression 3D.
Il aura fallu 18 mois de travail aux historiens de l’art, ingénieurs, programmateurs et techniciens membres du projet The next Rembrandt pour aboutir à un résultat saisissant.
Présenté cette semaine à Amsterdam, le tableau semble né de la main du maître mort il y a 347 ans. Pourtant, tout est le fruit d’une technologie de pointe développée pour l’occasion par les groupes ING et Microsoft.
« Les datas sont utilisées par beaucoup de gens pour les aider à être plus efficaces dans leur vie quotidienne ou par les grands groupes pour des raisons économiques. Mais dans ce projet, les datas servent à rendre la vie plus belle, à toucher l’âme humaine. » Ron Augustus, développeur informatique chez Microsoft
La naissance d’un chef-d’oeuvre numérique
La conception de ce vrai/faux Rembrandt a nécessité 4 étapes :
Étape 1 : Réunir les données. Pour constituer une « bibliothèque de Rembrandt » et fournir une documentation significative à l’ordinateur, 346 tableaux du peintre ont été numérisé par l’équipe grâce à un scanner 3D.

Étape 2 : Établir un portrait robot. En analysant chaque toile, l’ordinateur détermine ensuite un sujet inédit mais typique du peintre : un homme caucasien, entre 30 et 40 ans, barbu, portant des vêtements sombres et une collerette et regardant vers la droite.

Étape 3 : Façonner les traits. S’appuyant sur les données enregistrées, et grâce à la technique du deep learning, le logiciel étudie tous les paramètres physiques et esthétiques relevés dans les différents tableaux comme la forme du nez, la couleur des yeux, l’implantation des cheveux… À partir de «[ces] traits spécifiques qui font d’un Rembrandt un Rembrandt », il crée les éléments du tableau comme Rembrandt l’aurait fait. Tout doit sembler sortir du pinceau du maître.

Étape 4 : Concrétiser. La toile de 148 millions de pixels est imprimée en 13 couches successives, grâce à une imprimante 3D. Poussant le mimétisme jusqu’au bout, les développeurs ont également étudié au scanner 3D les surfaces et textures de toutes les toiles de Rembrandt ainsi que les pigments utilisés. Résultat : à l’impression le tableau n’est pas qu’une image lisse mais présente un relief et une texture comme obtenus par les coups de pinceaux et la superposition des couches de peinture. L’effet est bluffant.

« Nous avons utilisé la technologie et les données comme Rembrandt a utilisé ses pinceaux et ses brosses pour créer quelque chose de nouveau. » Ron Augustus
Après avoir fait sensation auprès des quelques privilégiés qui ont pu l’admirer, The next Rembrandt devrait être la star d’une exposition grand public prévue prochainement mais dont la date et le lieu n’ont pas encore été dévoilés. D’ici là, l’expérience sera-t-elle renouvelée ? Pourrons-nous tous bientôt imprimer chez nous un Picasso, un Bacon ou un Monet ? Cette toile pourrait-elle être vendue ? Si oui, combien ? Et quid des faussaires qui risquent de s’emparer rapidement de cette aubaine technologique ? Décidément, il reste encore bien des questions autour de ce tableau dont on a sans doute pas fini d’entendre parler…
Audrey Renault